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Création ou évolution ?

 

D’où vient l’univers que nous habitons ?  D’où venons nous ?

A ces questions les hommes ont d’abord cherché des réponses dans des mythes fondés sur l’intuition ou la révélation, réponses qui n’ont pas été sans rapport avec la mise en place de pouvoirs fondés sur le contrôle étroit des esprits.

Sur la question de l’origine de l’existence de l’homme je voudrais tout de suite citer un éminent biologiste moléculaire, directeur de recherche au CNRS, Bertrand Jordan :

« On a peine à croire que tout cet édifice a été construit par le jeu de mutations aléatoires, de mutations sans but prédéfini, intervenues au long d’une évolution qui se perd dans la nuit de milliards d’années.

Je le sais intellectuellement, les preuves sont là aussi solides que possible, je les ai moi-même rencontrées dans mon travail de chercheur… et pourtant quelque chose me répugne à admettre cette construction par le hasard : il me semble qu’elle retire au monde toute signification profonde.  C’est là, bien sur, que se situe l’attrait des religions ou mythes qui donnent un sens à l’univers, illusions fallacieuses et bien souvent meurtrières, le passé l’a hélas abondamment montré. »

Au cours des siècles a émergé une autre approche de la connaissance du monde fondée sur l’observation, l’analyse rationnelle, la déduction de conclusions vérifiables, contrôlables, conduisant à un assentiment fondé non pas sur la foi en un dogme mais au contraire sur le scepticisme à l’égard des faits .

Entre la publication de la « Philosophie zoologique » en 1809 de Jean-Baptiste Lamarck, ouvrage le plus célèbre des écrits transformistes du naturaliste français et celle de « L’origine des espèces » en 1859 de Charles Darwin, naturaliste anglais, l’idée que les espèces vivantes dérivent les unes des autres à travers des variations transmises par voie de génération a mis exactement un demi siècle à élaborer les fondements du transformisme moderne.

Pour comprendre les sciences de l’évolution il est nécessaire de se référer à deux types de preuves : des preuves historiques et des preuves expérimentales.

La recherche de preuves historiques consiste à observer des faits  actuels, à les mettre en cohérence et en déduire les conditions du passé qui sont à l’origine de ces faits. C’est la cohérence maximale des faits qui garantit la pertinence de la conclusion et la valeur de la théorie .

La phylogénie ou étude de la formation et de l’évolution des organismes vivants aboutit à la construction d’arbres phylogénétiques qui traduisent les degrés relatifs d’apparentement des espèces mais également le déroulement historique de leur apparition et l’ordre relatif d’acquisition de leurs attributs.

 

Ensuite la recherche de preuves expérimentales consiste davantage à agir sur le monde réel. Ainsi pour simuler l’origine abiotique de molécules biologiques, tels les acides aminés, les biologistes Stanley Miller et Harold Hurey ont soumis des composés abiotiques simples ( méthane, hydrogène, ammoniaque, eau ) à certaines conditions physiques dont on pense qu’elles pouvaient être celles d’une terre primitive ( chaleur, décharges électriques ).

Ils ont fabriqué « in vitro » de nombreux acides aminés, constituants élémentaires des protéines, ainsi que des bases puriques des acides nucléiques, briques entrant dans la constitution du vivant

Il est important de comprendre que toute la biologie et toutes les sciences de l’évolution fonctionnent ainsi sur deux régimes de preuves.

Darwin avait établi sa théorie sur des preuves historiques basées sur de nombreuses observations et sur leur mise en cohérence. (observations faites au cours d’un voyage autour du monde pendant presque 5 ans à bord du Beagle en qualité de naturaliste, et dont il rapporte un journal et des matériaux propres à l’élaboration de sa future théorie).

Les nombreuses expérimentations et découvertes qui ont suivi ont conduit à  une évolution de sa théorie  (up grade diraient les informaticiens)  mais elles ne l’ont jamais infirmée.

Nombre de créationnistes américains qui pratiquent une lecture littérale de la genèse s’en tiennent à une création du monde en 6 jours fidèles en cela au canon IV, session III, article 3 du Concile Vatican  de 1870, je cite :

 « Si quelqu’un dit qu’il est possible que les dogmes proposés par l’Eglise se voient donner parfois, par suite du progrès de la science, un sens différent de celui que l’Eglise a compris et comprend encore, qu’il soit anathème. »

Ou encore à l’Encyclique « Pascendi Dominici Gregis  §38 du Pape PieX sur les erreurs du modernisme en 1907, je cite :

« C’est pourquoi aussi le sens des dogmes doit être retenu tel que notre Sainte Mère Eglise l’a une fois défini, et il ne faut jamais s’écarter de ce sens, sous le prétexte d’une plus profonde intelligence. »

En 1925 a lieu  un procès connu sous le nom de « procès du singe » au cours duquel un enseignant, John Thomas Scopes est condamné pour avoir enseigné l’évolution à l’école publique de Dayton, condamnation prononcée en vertu d’une loi de l’état qui interdit à tout enseignant d’université, d’école normale ou de toute autre école publique financée partiellement ou totalement par des fonds de l’état d’enseigner une théorie qui nie l’histoire de la création divine de l’homme telle qu’elle est enseignée dans la bible.

Dans les années 1960 le Congrès américain entreprend une rénovation du système éducatif, les manuels de biologie sont renouvelés et la théorie de l’évolution trouve sa place dans les programmes.

Les créationnistes se devaient de réagir, mais nous ne sommes plus en 1920, la génétique en pleine expansion donne une base matérielle à la théorie de l’évolution, il n’est plus possible de rallier massivement à une interprétation littérale de la bible. Ils vont donc se doter de tout l’habillage nécessaire pour faire illusion, tout est bon pour se donner l’apparence de science.

Les doutes, les tâtonnements, les confrontations, les remises en question des chercheurs, éléments inexistants dans l’acceptation d’un dogme, mais éléments normaux, voire indispensables, dans une démarche scientifique, sont pain béni pour les créationnistes. Stéphane Herguetta, zoologue membre de la Société zoologique de Paris et du Muséum National d’histoire naturelle écrit à leur propos : « S’engouffrant dans la moindre zone de faiblesse du fonctionnement du système scientifique ; ils jouent de toutes les armes dialectiques et médiatiques pour transformer les garde-fous du système de validation et de contrôle des données scientifique pour discréditer les découvertes des chercheurs. »

 

Concernant un phénomène inexpliqué, le propre de la recherche scientifique est de s’en tenir au fait qu’il y a une explication naturelle, mais qu’elle n’est pas disponible pour l’instant, faute de données observationnelles plus poussées, ou faute de théorie plus fine, et qu’il s’agit là d’un « trou » qui sera bouché plus tard, et non pas de faire intervenir une entité transcendentale , une sorte de Dieu bouche trou.

C’est sans doute dans l’étude du vivant que le recours précipité à une explication métaphysique ou religieuse est le plus fréquent. Mais il est de plus en plus difficile de faire intervenir Dieu à tout bout de champ car l’autonomie de la méthode scientifique s’impose de plus en plus comme une revendication légitime.

Les créationnistes changent donc de tactique, ils vont recourir au vieil argument de l’analogie. Prenons une montre, avec son mécanisme de précision, elle est forcément le fruit d’une intelligence conceptrice et non d’un assemblage aléatoire. N’en est-il pas de même pour ces organismes complexes que sont les êtres vivants ? Ils vont prétendre que ces organismes sont « irréductiblement complexes » et donc qu’ils ne peuvent pas avoir été produits graduellement pensant ainsi avoir fait la preuve scientifique de l’existence d’un grand horloger, qu’ils désigneront sous le vocable « Intelligent design »  traduit en français par « dessein intelligent », mais ne nous y trompons pas la thèse reste créationniste : Dieu a créé la vie avec une programmation de l’évolution qui conduit à l’homme. Même si elle ne se réfère plus à une interprétation littérale du récit de la création elle cherche bien à établir un pont entre la bible, les sciences et l’éducation, il s’agit d’une nouvelle tentative pour revenir sur la dichotomie entre foi et connaissance matérialisée dans la laïcité.

 Leur exemple préféré est celui de l’ œil : il est tout à fait invraisemblable, disent-ils , qu’un instrument d’une telle précision ait pu apparaître à la suite de mutations survenues au hasard, d’autant qu’il forme un tout, que la rétine serait inutile sans cristallin et réciproquement , l’œil forme un ensemble indissociable qui n’a pas pu être assemblé petit à petit. Le mécanisme de l’évolution ne peut  pas jouer dans ce cas, il faut donc invoquer un autre principe pour expliquer la présence de cet organe :l’intervention d’une entité supérieure

Leur raisonnement est faux : il n’est pas vrai qu’un demi œil équivaut à pas d’œil du tout. Un animal possédant une cellule vaguement photosensible (le tournesol en possède !) lui permettant de sentir la lumière et, grossièrement sa direction,  sera fortement avantagé par rapport à son congénère dépourvu d’un tel récepteur, l’individu chez lequel une membrane transparente protège la cellule photosensible sera également favorisé, puis ce sera autour de celui dont cette membrane aura pris une épaisseur et une forme lui permettant une focalisation plus ou moins rudimentaire de la lumière.

Des exemples de ces yeux, plus ou moins primitifs, se retrouvent chez divers animaux. Certains vers et coquillages ont un organe constitué de quelques cellules photosensibles disposées au fond d’une petite cavité ouverte à l’extérieur, ils peuvent ainsi détecter la direction d’où vient la lumière ? Chez d’autres, comme le nautile, la cavité est devenue plus profonde et forme une sphère avec une ouverture de petite dimension permettant la formation d’une image au niveau des cellules photosensibles selon le principe de la «camera oscura » ; Les pieuvres et les seiches disposent, elles, d’une lentille améliorant les qualités optiques de cet appareil (1)

L’analyse de l’ADN a permis d’apporter une réponse à cette question. Des mutations dans la séquence d’un gène présent sous une forme très semblable chez l’homme et chez la souris, gène appelé Pax 6, aboutissent à une affection appelée aniridia chez l’homme et Small eye chez la souris dans lesquelles l’œil est de petite taille et l’iris réduit ou absent.

Le gène équivalent chez la mouche drosophila melanogaster (une génération= 15 jours) est appelé eyeless. En 1995 Walter J. Gehring  a activé la transcription du gène eyeless dans différentes parties du corps des larves de drosophiles et il a pu constater la présence d’yeux sur les pattes, les antennes, les ailes. Eyeless est donc bien le gène source qui dirige la formation de l’œil chez la mouche.

De plus une équipe de recherche transféra le gène Pax6 de la souris dans une larve de mouche et vit également apparaître des yeux surnuméraires sur les pattes. La mouche sait donc lire le gène de la souris ; pourtant ces 2 espèces ont divergé il y a 500 millions d’années.

D ‘autre part, le raisonnement des partisans du « dessein intelligent »pour lesquels il n’est pas possible  que l’œil soit le résultat d’un assemblage qui s’est fait petit à petit au cours de l’évolution, ce raisonnement fait l’impasse d’une double immensité :

-l’immensité du temps dans  lequel se déroule l’évolution, un milliard d’années  depuis l’émergence des premiers êtres multicellulaires soit cinquante million de générations pour des êtres humains.

-l’immensité des populations, des milliards d’individus sur lesquels à chaque génération d’innombrables mutations, souvent neutres, parfois néfastes, de temps en temps bénéfiques se produisent.

Empruntons un exemple à Albert Jacquard sur le calcul de la probabilité d’un événement une fois qu’il a eu lieu et adaptons le à cette noble assemblée

Si chacun de nous dispose de 10 chemises, de 10paires de chaussettes, de 5 vestes, de 5 pantalons et de 4 chapeaux la probabilité calculée la veille pour que chacun soit vêtu comme il l’est ce soir est :1/10X1/10X1/5X1/5X1/4=1/10000 soit 10-4.

Nous sommes n, la probabilité pour que l’ensemble des présents soit habillée comme  ce soir est de 0, 00…(nX5 zéros)…001. c’est a dire une probabilité pratiquement nulle.

Faut-il en conclure qu’une intelligence qui nous échappe, un « dessein intelligent » est intervenu dans le choix de nos vêtements ?

 

Les adeptes du « dessein intelligent » rejettent l’évolution sous prétexte qu’elle n’explique pas tout. Mais qu’explique donc le « dessein intelligent » ? Laissons répondre le philosophe Marcel Conche, Professeur émérite à l’Université Paris1 Panthéon La Sorbone  : « Et d’ailleurs d’où vient que l’homme ait 2 bras et 2 jambes ? Si l’on dit que cela s’explique par le dessein de Dieu, le terme est impropre, car si l’homme avait 4 bras et 4 jambes, on invoquerait le même Dieu. Une cause qui explique un effet et aussi bien un effet tout différent, n’explique ni l’un ni l’autre. »

 

.Où en sommes nous au 21ème siècle ?

-Aux Etats Unis :  Le mouvement fondamentaliste  connaît un regain inquiétant depuis la réélection de George W. Bush. Lors d’une conférence de presse tenue le 1er août 2005 avec des journalistes texans, le président américain affirmait que la doctrine du dessein intelligent devrait figurer dans les manuels scolaires au même titre que le darwinisme :  « Ces deux théories doivent être correctement enseignées de manière à ce que les gens saisissent la nature du débat,  l’éducation ne consiste-t-elle pas à exposer les écoliers à différentes écoles de pensée ».

Les demandes de voir les programmes scolaires se conformer en partie à la parole révélée ne cessent d’éclore.

Le débat pseudo-scientifique engagé par la puissante institution créationniste américaine Discovery Institute autour de la thèse du dessein intelligent est une étape stratégique dans le combat politique qui vise la cléricalisation de la sphère publique. Les méthodes et objectifs de cette institution sont précises dans un texte : Le Wedge document.

« L’idée que l’être humain a été créé à l’image de Dieu est l’un des principes fondateurs de la civilisation occidentale. Pourtant voici un peu plus d’un siècle cette notion cruciale a été attaquée de toutes parts par des intellectuels qui s’appuyaient sur les découvertes scientifiques… Ce triomphe du matérialisme a eu des effets ravageurs, culturellement parlant. Les matérialistes ont nié l’existence de normes morales objectives… ils ont plaidé en faveur de programmes fondés sur de fausses promesses de paradis sur terre. »

Les objectifs principaux précisés dans ce texte sont :

-Faire échec au matérialisme scientifique et à son héritage destructeur sur les plans moral, culturel et politique.

-Remplacer les explications matérialistes par la vision théiste qui veut que la nature et les êtres humains ont été créés par Dieu.

 

-En Europe : Aujourd'hui, ces thèses sans la moindre base scientifique se répandent progressivement en Europe, quelquefois en suivant des canaux pseudo-religieux

C'est ainsi qu'en Pologne, le ministre de l'éducation Miroslaw Orzechowski (extrême-droite), qui avait déjà décidé de mettre à l'index des programmes scolaires certains auteurs comme Goethe, Kafka, Dostoïevski entre autres, a condamné publiquement le darwinisme, comparant la théorie scientifique à la trame d'un mauvais film de science-fiction.

En Italie, la ministre de l'éducation Letizia Moratti, sous le gouvernement Berlusconi, a déposé en 2004 une proposition de décret destiné à abolir l'enseignement de l'évolutionnisme dans le primaire et le secondaire. Mais grâce à une véritable mobilisation de scientifiques, c'est la proposition de décret qui a été finalement abolie… Et la ministre a remis sa démission.

En Allemagne, des professeurs d'un lycée privé reconnu par l'Etat ont décidé d'enseigner que les différents types d'animaux sont l'œuvre directe d'un "créateur". Le tollé et les protestations des parents devant cette orientation n'ont réussi qu'à obtenir… l'approbation du gouvernement, sous le prétexte qu'aucune infraction aux programmes scolaires n'avait été constatée.

Début février 2007, la presse française s'est fait l'écho d'un envoi en grand nombre à différentes instances du ministère de l'Éducation Nationale (rectorats, bibliothèques, centres d'information pédagogiques, enseignants) d'un livre à caractère encyclopédique L’Atlas de la Création , écrit par Harun Yahya et publié par la maison d'édition Global d' Istambul. Selon différents organes de presse, cet envoi était suffisamment massif pour que le ministère de l'Éducation Nationale diffuse un message d'alerte afin de mettre en garde les destinataires envers une action qui présente un fort caractère de propagande et de prosélytisme. Fin mars 2007, la presse de  la suisse romande se fait, à son tour, l'écho d'une action similaire à destination, là aussi, du système éducatif public du pays.

      Au Conseil de l’Europe, un rapport dont la conclusion était :Le créationnisme est une négation de  l’évolution et il peut-être discuté en histoire des religions mais en aucun cas être une discipline scientifique , rapport présenté par Guy Lengagne a été refusé le 26 juin dernier (par 64 voix contre 46), et renvoyé en commission, c'est-à-dire en pratique dans les oubliettes, le rapporteur estime que au vu des voix qui ont rejeté le rapport sans même l’avoir discuté « le cancer est plus avancé que je ne le pensait…L’une des atteintes aux droits de l’homme est d’empêcher un homme de penser. L’homme a cherché à comprendre comment fonctionnait ce qui l’entourait, et le “pourquoi” de ces choses. Il y a là une profonde atteinte aux Droits de l’Homme en essayant de perturber cet enseignement avec quelque chose qui est du ressort des religions ou de la métaphysique, mais qui n’a rien à voir avec de la science. Ce qui s’est passé est une honte. » Depuis, le rapport si cher à Guy Lengagne, dont la discussion avait été repoussée, présenté cette fois par Anne Brasseur est devenu une Résolution du Conseil de l’Europe.

En France l’UIP (Université Interdisciplinaire de Paris) qui n’a d’université que le nom, professe depuis plusieurs années l’avènement d’une nouvelle vision du monde qui  réconciliera la science et la religion, la foi et la raison, selon un principe qui affirmant que les propriétés de l’univers ont été finement ajustées, dés l’origine,  dans le but de  l’existence de l’homme et que le monde dans son ensemble est orienté selon une finalité précise, d’origine supérieure et mystérieuse.

En ce qui concerne l’Eglise la déclaration du pape Jean-Paul II à l’Académie pontificale des sciences du 22 octobre 1996 reconnaît que la théorie de l’évolution « s’est  progressivement imposée à l’esprit des chercheurs, elle est donc plus qu’une hypothèse » mais se référant à l’encyclique « humani generis » de Pie XII « si le corps humain tient son origine de la matière vivante qui lui préexiste, l’âme spirituelle est immédiatement créée par Dieu » il ajoute : « avec l’homme nous nous trouvons donc devant une différence d’ordre ontologique, devant un saut ontologique, pourrait-on dire » Cette conception de l'homme est la conception catholique classique sur l'humanité; Il ne peut y avoir d'humanisation progressive par évolution; cette dernière n'est accordée que pour le biologique, le corps. L'homme spirituel nécessite l'intervention de Dieu.

Le même Jean-Paul II dans sa dernière encyclique, Foi et Raison, ne précise-t-il pas que  le philosophe chrétien « est toujours guidé par le supplément d’intelligence que lui donne la parole de Dieu ». (2)

 Faut-il s’inquiéter d’un durcissement du pape actuel pour qui « tout système de pensée qui nie ou cherche à réfuter la preuve écrasante qu’il y a une "intelligence supérieure" en biologie est de l’idéologie, pas de la science. »

 

Malgré les progrès de la recherche scientifique, une telle situation risque de durer encore longtemps car chercher à comprendre prend toujours plus de temps que de tout remettre entre les mains d’un « grand horloger », et le débat entre foi et raison risque d’être un éternel débat.

Nous sommes des êtres avides de sens et il faut bien reconnaître qu’il est très perturbant pour l’homme d’admettre que le pouvoir créateur de l’esprit est né par l’énergie productrice de la matière, le mouvement est inhérent  à celle-ci, il ne lui est pas insufflé par une « intelligence supérieure ».

Il nous est difficile de penser que nous ne sommes que le produit de phénomènes aléatoires qui laissent à penser que l’homme aurait aussi bien pu ne pas apparaître. Bien avant Darwin, les travaux de Copernic et de Galilée ne nous auraient-ils pas déjà alerté ?

Nous vivons, selon Bruno Alexandre, depuis trop longtemps avec le sentiment d’être à part, hors de la sphère animale, pour ne pas être  ébranlés par les connaissances scientifiques actuelles, la science d’aujourd’hui gomme le hiatus que nous avions supposé sous l’influence judéo-chrétienne. Ce que nous avions orgueilleusement décrété comme une différence de nature n’est plus qu’une différence de complexité.

Citons Patrick TORT, professeur détaché au Muséum national d’histoire naturelle , dans la conclusion de son ouvrage : Darwin et le Darwinisme :

« Le formidable programme interdisciplinaire inscrit dans l’œuvre  de Darwin n’est pas prés d’être épuisé. Pour l’heure, aucune des grandes divisions des sciences naturelles, de l’anatomie comparée à la biochimie moléculaire en passant par la paléontologie et la génétique, de l’écologie à l’éthologie en passant par l’étude de la vie microbienne et virale, ne saurait se soustraire à la production convergente de confirmations nouvelles de la dynamique darwinienne des changements évolutifs »

 

C’est donc au deuil de la conception de l’homme comme centre de la création que la quête de la connaissance exige que nous procédions.

 

   

 

 

 

(1) A noter au passage que l’œil des vertébrés comporte une aberration majeure : la zone photosensible des cellules de la rétine est disposée à l’envers, à l’arrière des cellules et derrière les fils conducteurs qui transmettent les impulsions électriques et qui cheminent sur la rétine pour former le nerf optique : la lumière doit donc traverser ce câblage, puis les cellules rétiniennes avant d’atteindre la zone photo sensible .Conception aberrante, mais, apparemment, dans le long chemin qui a conduit à notre œil, l’évolution s’est trouvée bloquée dans une voie illogique dont elle n’est pas sortie ; on peut d’autant plus penser cela que chez d’autres animaux comme la pieuvre, dont l’œil a évolué séparément de celui des vertébrés, les cellules rétiniennes sont dans le bon sens, celui que suggère la logique.

 

(2)  ne retrouve-t-on pas dans cette scandaleuse distinction entre une humanité croyante supérieure et une humanité athée inférieure, la hiérarchie établie récemment entre l’instituteur et le curé par le Président de la République Française reçu par BenoitXVI.

 

 

Bibliographie :

-          « Darwin et le darwinisme » Patrick Tort, Que sais-je PUF 2005

-          « Création ou évolution ? La science et le crépuscule des dogmes

                           Bruno Alexandre, Editions SDE,  2004  

                -       « Le chant d’amour des concombres de mer »   Bertrand Jordan, Seuil 2006

-      « Dieu versus Darwin » Jacques Arnould, Albin Michel   2007

-      « Jamais soumis, jamais soumise »

                               Albert Jacquard, Fadela Amara,   Stock  2007

-          « Les dossiers de la recherche » N° 27 mai-juin 2007

-          « L’évolution a-t-elle un sens » Science & Vie  N°1059 Décembre 2005

-      « La bible contre Darwin » Le Nouvel Observateur hors-série Janvier 2006

 

 

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