CONDORCET
un précurseur
Pourquoi ce choix :
Il est né d ‘une curiosité professionnelle,
en effet, ayant passé vingt ans de ma vie
à travailler en formation professionnelle continue et même à militer
pour son développement, en étudiant l’histoire
de la formation continue en France, j’ai retrouvé un certain nombre de
citations sur le sujet empruntées à Condorcet qui étaient et sont encore
d’actualité : Je cite :
« L’instruction ne devrait pas abandonner les individus au moment où ils sortent des écoles ; … elle devrait embrasser tous les âges, qu’il n’y en ait aucun où il ne fut utile d’apprendre… l’instruction doit assurer aux hommes, dans tous les âges de la vie, la facilité de conserver leurs connaissances ou d’en acquérir de nouvelles ». Maintien des connaissances, perfectionnement et recyclage, les finalités essentielles de la formation continue même actuelles étaient déjà formulées par Condorcet en 1791 et les justifications données ensuite : la justice sociale, l’évolution des connaissances, l’apparition du travail parcellaire, la formation des citoyens me paraissent encore d’actualité.
J’avais participé en 1986 à une grande «messe » de la Formation continue organisée à Paris et intitulée «les entretiens de Condorcet » et je m’étais promis lorsque j’en aurais le loisir, de chercher à mieux connaître ce personnage qui il y a plus de deux siècles avait des idées sur la formation continue qui sont encore d’actualité.
D’autre part, ayant lu dans un ouvrage : « La Franc Maçonnerie, un monde secret de André DAPREY, dans la liste des personnalités célèbres que Condorcet était franc-maçon, j’ai pensé qu’une planche sur lui pouvait présenter un intérêt à vos yeux.
Or après lecture du livre D’Elisabeth et Robert Badinter intitulé «Condorcet, un intellectuel en politique » et consacré à une biographie très détaillée de Condorcet, ceux ci notent (p. 181) : « aucun document officiel de la loge des Neufs Sœurs, loge à laquelle appartenaient de nombreux amis de Condorcet, ne mentionne son nom. » et aucune des recherches qu’ils ont pu réaliser sur le sujet ne fait apparaître avec certitude qu’il ait été initié. Ils notent cependant, que les idéaux de cette loge «correspondent à ceux de Condorcet ». C’est d’ailleurs dans cette loge que Voltaire, grand ami de Condorcet fut initié quelques semaines avant sa mort.
A titre anecdotique ? je voudrais vous signaler
ce que dit l’Encyclopédie universelle hachette, version Multimédia sur la
franc maçonnerie à cette époque là : « Le complot introuvable avant 1789 » Pour faire la Révolution, les paysans, les membres du bas clergé et les «intellectuels » de Paris
et de province
– surtout
ceux
qui
n'avaient
pas
trouvé
place
dans
la «république des
Lettres
» – n'eurent
pas
recours
à la franc-maçonnerie.
Au contraire,
les
frères
proclamaient
bien
haut,
sous
l'Ancien
Régime,
leur
refus
de conduire
une
entreprise
de destruction
de l'ordre
social
et leur
volonté
d'empêcher
l'avènement
du règne
des
foules.
Les 1 000 loges (ou orients ) maçonniques existant en France avant 1789 ne furent pas des laboratoires où l'on fit secrètement l'expérience de l'égalité et de la démocratie.
Certes,
quelques-unes
l'ont
été,
notamment
à Paris,
où, comme
dans
les
cercles
et les
cafés,
un homme
égalait
un homme.
Mais,
dans
le vaste
réseau
des
provinces,
la règle
fut
au brassage
social
prudent,
tant
la noblesse
et les
notabilités
commençaient
à s'inquiéter
du désordre
croissant
à la ville,
à la campagne
et dans
l'appareil
d'État.
Cette
attitude
frileuse,
respectueuse
de l'ordre
social
établi,
déconcerta
et découragea
ceux
qui
attendaient
de l'Ordre
plus
d'audace,
et plus
de convergence
entre
les
principes
et les
pratiques. »
Condorcet
n’était donc certainement pas initié, mais il semblerait que la franc maçonnerie
de l’époque n’avait majoritairement pas des idées aussi « avancées »
que lui.
Malgré les doutes sur l’appartenance de Condorcet à la Franc Maçonnerie, j’ai décidé de continuer mon étude sur le personnage. Cette planche a été tracée à partir des documents suivants :
-
Condorcet un intellectuel en politique ; Elisabeth et Robert
BADINTER ; Ed.Le livre de poche.
-
Premier mémoire sur l’instruction publique ; CONDORCET, ; Ed.
Les mille et une nuits.
-
Condorcet Instituer le citoyen ; Charles COUTEL ; Ed Michalon
Collection Le bien commun.
-
Histoire de l’éducation des adultes en France ; Noël TERROT ;
Ed. Edilig.
-
De nombreux sites Internet consacrés à Condorcet. ( A noter que
lorsqu’on demande une recherche sur son nom à «voilà » moteur de
recherche, on obtient 6742 réponses).
Cette planche se présente selon le schéma suivant :
1.
Une biographie sommaire ;
2.
Les différentes facettes de l’homme public : mathématicien,
homme politique, journaliste, philosophe ;
3.
En quoi fut-il un précurseur ?
4.
Réflexions personnelles suggérées par cette recherche.
1 . Biographie sommaire :
LES GRANDES DATES DE LA VIE DE
CONDORCET |
|
1743 |
Le
17 septembre :
Naissance de Marie Jean Antoine Nicolas Caritat, marquis de Condorcet
dans l’Aisne à Ribemont fils de Antoine Chevalier de Condorcet et de
Marie Madeleine Gaudry Veuve St Félix |
1743 |
Le
22 octobre :
Son père, qui était capitaine, meurt au cours de manœuvres d’entraînement.
Condorcet est âgé de un mois. |
1743
à 1752 |
.Couvé par une mère dévote (on signale même
qu’elle l’avait voué au culte de Marie et qu’il resta habillé
d’une robe blanche jusqu’à l’age de neuf ans) et ayant pour seul
modèle masculin un oncle évêque très sévère |
1752
à 1754 |
Eduqué à domicile par un précepteur jésuite. |
1754
à 1758 |
Interne au Collège des Jésuites de Reims et cela
pour 4 ans. Il en gardera un anticléricalisme pour le reste de sa vie.
Je le cite : « Ces collèges
sont régis par 3 principes : une surveillance constante,
l’appel à la délation et les punitions corporelles. »(p.20) |
1758 |
Entre au Collège de Navarre à Paris qui décide
de son goût pour les mathématiques et la physique. |
1759
à 1762 |
Condorcet est bachelier en 1759 et présente sa thèse
cette même année. Il a parmi ses juges d’Alembert qui l’aurait
remarqué. Il a 16 ans et doit rentrer à Ribemont dans sa famille. Son oncle et sa mère
ont décidé qu’il serait officier. Il refuse et résiste deux années enfermé dans sa chambre à faire des mathématiques.
|
1762 |
La famille «rend les armes »et accepte
qu’il retourne à Paris pour devenir mathématicien. Il vient à
Paris, vit d’une petite pension que lui verse sa mère, apprend et
travaille les mathématiques. |
1765 |
Il publie un travail sur le Calcul Intégral qui
obtient un grand succès. Il n’a que 22 ans et s’est déjà fait un
renom de géomètre. |
1769
à 1773 |
Il entre à l’Académie des Sciences en 1769. Il se lie d’amitié avec Turgot, Voltaire et d’Alembert. (Note de E et R Badinter
p. 53 : « cet orphelin trouva les plus prestigieux pères
spirituels : D’Alembert lui légua l’amour de la vérité,
Turgot la passion du bien public et Voltaire le refus de l’injustice ».). En plus des mathématiques, il multiplie ses réflexions
en politique et en économie et participe à la rédaction de «l’Encyclopédie ». |
1773 |
Le
6 mars
il est nommé secrétaire adjoint de l’Académie des Sciences. |
1774 |
Il est appelé par son ami Turgot, qui a été nommé
par Louis XVI, ministre d’État aux Finances, à rentrer dans son
ministère comme conseiller technique chargé de concevoir une réforme
de l’activité scientifique et d’impulser la science hydraulique. |
1775 |
Il est nommé Inspecteur des Monnaies, fonction
qu’il perdra en 1776 quand Louis XVI demandera la démission de
Turgot. |
1776 |
Le
7 août
il est élu Secrétaire Perpétuel de l’Académie des Sciences. Il
collabore à la deuxième édition de l’"Encyclopédie" pour
sa partie mathématiques. |
1778 |
Mort de Voltaire à qui on refuse une sépulture
religieuse. Condorcet défend la mémoire du grand écrivain dans des
articles. |
1782 |
Le
21 janvier
Condorcet entre à l’Académie française. Le
29 octobre
c’est la mort de son ami d’Alembert. Dès lors, Condorcet est le
dernier des grands encyclopédistes. Il devient l’un des phares de la
société parisienne et une des personnalités scientifiques réputées
en Europe entière. |
1786 |
Il est chargé de mathématiques au Lycée, un établissement
privé de Paris. Publie un premier ouvrage politique intitulé
"Vie de Turgot", qui est une apologie. En
décembre
il épouse Sophie de Grouchy. Leur salon
à l’Hôtel des Monnaies devient un des hauts lieux de la
capitale où se rencontrent, savants, philosophes, hommes politiques et
visiteurs européens de renom. |
1788 |
Il prend parti pour le nouveau gouvernement où siège
Malesherbes car il apprécie certaines mesures prises : suppression des
corvées, liberté du commerce des grains, réforme des lois
criminelles. Il applaudit à la convocation des États Généraux,
d’autant plus que le roi a accordé la double représentation du Tiers
État. |
1789 |
En mars, il est chargé de rédiger un cahier de
doléances commun aux trois ordres (noblesse, Clergé et Tiers Etat)
susceptible d’être adopté par tous. ( Projet rejeté, le clergé
ayant refusé d’abandonner ses privilèges). En avril il est chargé
de rédiger le cahier de doléances de la Noblesse. Il participe à la création de la Société de
1789, Société regroupant les grands de la politique et de la science. Condorcet se présente à la députation pour représenter
la Noblesse de Paris, puis pour représenter le Tiers Etat de Paris. .
Il n’est pas élu et ne siègera donc pas aux États Généraux. Durant l’affrontement décisif de l’été 1789
(Réunion des états généraux et journées insurrectionnelles de
juillet), il ne joua aucun rôle. ( p ; 306) En septembre, il est élu à la municipalité de
Paris et en octobre président de l ‘assemblée municipale. |
1790 |
Au printemps, naissance d’Eliza Condorcet, fille
unique du couple. Cette année, l’Assemblée confie à l’Académie
des Sciences la responsabilité d’établir un nouveau système de
poids et de mesures pour la France entière. Condorcet participera
activement au projet. Il se lie avec
La Fayette, Mirabeau et l’abbé Sieyès et il milite au club des Jacobins. ( p.326) Il mène des combats (articles, mémoires,
discours, propositions de textes de lois…),
pour le vote des femmes, la reconnaissance du droit de cité aux
juifs et aux protestants, contre la traite et l’esclavage des noirs
… |
1792 |
Il est nommé
Secrétaire de l’Assemblée Législative, puis vice-Président
en janvier et Président en
février. Il porte en particulier ses efforts sur un projet
de planification de l’instruction publique. Il voudrait que les maîtres
mots soient : égalité des chances pour tous et laïcité. Malgré toutes ses réticences, il vote pour la déclaration
de guerre contre le roi de Bohême et de Hongrie. |
1792 |
Devant les revers de l’armée et les trahisons
diverses, le 11 juillet, il vote avec presque tous les députés la
proclamation de la patrie en danger confiant ainsi aux citoyens le sort
de la patrie et de la liberté. Le
21 septembre
la République
est proclamée. Condorcet est
élu vice-président. |
1793 |
Condorcet vote la culpabilité de Louis XVI mais
non la mort (il est contre la peine de mort). En
février
il achève un projet de constitution fondé sur le principe de l’égalité
naturelle qui sera étudié et pratiquement accepté en totalité,
mais le 13 mai, Robespierre décide de reprendre la question
constitutionnelle sur d’autres bases. En
juin
Condorcet écrit un réquisitoire contre le nouveau projet de
Constitution qui a été préparé en seulement 8 jours. La Convention
vote l’arrestation de Condorcet le 8juillet. |
1794 |
Il se cache chez une veuve, Mme Vernet et écrit
son œuvre maîtresse et son œuvre testament : "Esquisse d’un
tableau historique des progrès de l’esprit humain". Il est arrêté début mars. Le
29 mars
il est retrouvé mort dans sa prison. L’on ne sait s’il s’agit
d’une mort naturelle ou d’un suicide. |
Quelques caractéristiques physiques et traits de caractère :
GRIMM (Baron de ) Ecrivain et critique allemand qui vivait à la cour :
« La
bonté brillait dans ses yeux et il aurait eu plus de tort qu'un autre de n'être
pas honnête homme, parce qu'il aurait trompé par sa physionomie, qui annonçait
les qualités les plus paisibles et les plus douces. »
Benjamin FRANFLIN ( Courrier à ) Un de ses
amis du «nouveau Monde » : «Sa
politique est celle d’un homme qui croit au pouvoir de la raison et à la réalité
de la vertu, et qui aurait voulu se rendre l’instituteur de ses concitoyens
avant d’être appelé à en devenir le législateur ».
Timide, mal à l’aise en société, ce n’est pas un homme de salon ni un grand orateur. Intègre, rationaliste, c’est un travailleur acharné.
2
. LES DIFFERENTES FACETTES DE L’HOMME PUBLIC :
L’HOMME DE SCIENCES
Pour
Condorcet, sa passion pour les mathématiques en font un objet de recherches,
mais aussi un refuge lorsqu’il a des difficultés. Il a écrit de nombreux
ouvrages mathématiques.
Il a participé à la rédaction de l'Encyclopédie
de DIDEROT et D'ALEMBERT.
Il est également à l'origine de l'expédition chargée
de mesurer le méridien de Dunkerque à Barcelone, qui va permettre de calculer
la nouvelle unité de mesure universelle : Le mètre.
Il est le premier à envisager l’utilisation des mathématiques et notamment les statistiques et les calculs de probabilités dans l’analyse sociale devenant ainsi un précurseur de la création des sciences sociales. ( Certaines de ses idées ne seront reprises qu’au XXème siècle).
LE PHILOSOPHE :
Toute société
qui n'est pas éclairée par les philosophes est trompée par des charlatans.
Condorcet
C’est bien dans le domaine philosophique qu’il aura marqué son temps par ses écrits, ses prises de position qui pour la plupart restent encore aujourd’hui d’actualité. Confronté à la révolution et à l’institution d’une nouvelle organisation de la société, il a du énoncer les grands principes, les traduire en réponses institutionnelles et pédagogiques.
Il entend contribuer à «l ‘institution du citoyen », qui suppose à la fois l’instruction publique et la fondation de la république : « il faut éclairer les hommes pour en faire des citoyens ».
« Une constitution vraiment libre, où toutes les classes de la
société jouissent des même droits, ne peut subsister si l’ignorance d’une
partie des citoyens ne leur permet pas d’en connaître la nature et les
limites. » (Œuvres
complètes en 12 volumes. Vol.
III p 383).
De toutes ces réflexions naîtront un certain nombre
de prises de positions :
·
Pour
la liberté de culte :
Condorcet, athée mais tolérant publie un plaidoyer en faveur des
protestants(1781) et se mobilise en faveur des juifs pour leur reconnaître
la pleine qualité de citoyens et les droits afférents. Il a toujours
combattu le principe d'une religion dominante : « |
·
Pour
l'instruction publique :
Dans ses cinq "Mémoires sur l'instruction
publique" (1791-1792) proposés à l'assemblée législative,
Condorcet définit les bases d'un enseignement public, gratuit et laïque. "Offrir
à tous les individus de l'espèce humaine les moyens de pourvoir à leurs
besoins, d'assurer leur bien-être, de connaître et d'exercer leurs
droits, d'entendre et de remplir leurs devoirs ; établir entre les
citoyens une égalité de fait et de rendre réelle l'égalité politique
reconnue par la loi. Tel
doit être le premier but d'une instruction nationale, et, sous ce point
de vue, elle est pour la puissance publique un devoir de justice. Ainsi,
l'instruction doit être universelle, c'est-à-dire, s'étendre à tous
les citoyens. Elle doit être répartie avec toute l'égalité que
permettent les limites nécessaires de la dépense".
Ces mémoires seront
les bases des lois de Jules Ferry sur l’école publique, gratuite, laïque
et obligatoire cent ans plus tard |
·
Pour
l'égalité des hommes et des femmes (p
198) :
Parmi les philosophes et les hommes politiques, il
est le seul à s'indigner de voir les femmes traitées en mineures
politiques et à faire campagne en faveur du vote des femmes.
"[…] les droits des hommes résultent
uniquement de ce qu'ils sont des êtres sensibles, capables d'acquérir
des idées morales et de raisonner sur des idées. Ainsi les femmes ayant
ces mêmes qualités, ont nécessairement des droits égaux. Ou aucun
individu de l'espèce humaine n'a de véritables droits ou tous ont les mêmes
; et celui qui vote contre le droit d'un autre, quels que soient sa
religion, sa couleur ou son sexe, a dès lors abjuré les siens. " Condorcet, Essai sur l'admission des
femmes aux droits de cité.1790. |
·
Contre
l'esclavage des noirs (p.197 et 336) :
« Mes amis,
quoique je ne sois pas de la même couleur que vous, je vous ai toujours regardés
comme mes frères. La nature vous a formés pour avoir le même esprit, la même
raison, les mêmes vertus que les blancs. » Epître dédicatoire aux nègres
esclaves.
Dès 1774, Condorcet dénonce "l'horrible barbarie". Il répond aux colons que "si
nous ne pouvons manger du sucre qu'à ce prix", il faut savoir
renoncer à "une denrée souillée
du sang de nos frères". Il se
demande si "en rendant aux nègres
les Droits de l'Homme, ils ne pourraient pas cultiver comme ouvriers ou
comme fermiers, les mêmes terres qu'ils cultivent comme esclaves".
Ces propos mettent hors d'eux les planteurs des Iles. Pour Condorcet, l'esclavage est un crime parce que
c'est toujours le plus fort qui dépouille le plus faible. Ce n'est qu'à
partir de 1788 qu'il commencera à être entendu sur ce sujet.
L’esclavage a été aboli une première fois en 1794, puis rétabli par
Napoléon à l’instigation de Joséphine fille de planteur, puis aboli définitivement
en France en 1848. |
·
Contre
la peine de mort
Adversaire de la torture et de la peine de mort, en
janvier 1793, député de la
convention, Condorcet, restera fidèle à ses principes en refusant de
voter la mort de Louis XVI. Il avait voté pour "la
peine la plus élevée en deçà de la mort". |
·
Pour
une armée de défense de la nation, contre l’armée de conquête :
Extrait d’un discours prononcé à l’assemblée
en 1791 alors que les rois des pays voisins s’apprêtent à attaquer la France
pour rétablir Louis XVI dans toutes ses prérogatives : La nation française
a renoncé à entreprendre aucune guerre de conquête et »n’emploiera
jamais ses forces contre la liberté d’aucun peuple … la nation française
ne cessera de voir un peuple ami dans les pays occupés…Ses soldats se
conduiront sur une terre étrangère comme ils se conduiraient sur celle de leur
patrie … Les maux involontaires que ses troupes auraient fait éprouver
aux citoyens seront réparés … Elle présentera au monde le spectacle
nouveau d’une nation vraiment libre, respectant partout, en tout temps, à
l’égard de tous les hommes, les droits qui sont les mêmes pour tous… »
·
Pour
un système de protection de la
santé (p. 666) :
Dans son dernier texte, Esquisse d’un tableau
historique de l’esprit humain, écrit dans les derniers mois de sa vie, il prévoit
pour l’avenir, «qu’un système
d’assurance mutuelle pour tous ceux qui ne vivent que de leur travail,
garantira à chacun, et d’abord aux malades et aux vieillards, les ressources
nécessaires pour vivre. »
Il prévoit que les progrès de la médecine, de l’hygiène et le recul de la misère allongeront l’espérance de vie.
Ce n’est pas seulement un penseur, il mène un combat militant pour toutes ses idées, et s’engage en permanence, dans sa vie personnelle, publique et politique.
L'HOMME POLITIQUE
Sa carrière politique démarre en1774 quand Turgot l’appelle auprès de lui au Ministère de la marine ; Inspecteur des monnaies en 1975, président de l’Assemblée municipale de Paris, président de l’Assemblée Législative en 1792, élu à la convention, il bataillera tout au long de ses mandats pour faire prévaloir ses idées.
Piètre orateur, un peu rigide dans son comportement,
il rencontrera beaucoup de difficultés pour être en phase avec les évènements.
Dans les différentes assemblées où il siégea, il fut très souvent chargé
de rédiger les textes ( Constitution, Déclaration des droits naturels, civils
et politique des hommes, Mémoires sur l’instruction publique….)
Victime
de la lutte entre girondins et montagnards, se faisant un ennemi personnel de
Robespierre, il sera condamné et obligé de s’enfuir en 1793.
Condorcet a beaucoup écrit. De nombreuses lettres, à ses amis, à des personnalités célèbres en France (D’Alembert, Turgot, Voltaire, La Rochefoucauld, La Fayette…), en Europe ( Frédéric II, le Grand Duc de Russie, Beccaria…) , aux Etats Unis (Benjamin Franklin, Thomas Jefferson …) , des traités scientifiques, des essais, des éloges d’académicien, des ouvrages pédagogiques, des ouvrages économiques, la partie mathématiques de l’encyclopédie et beaucoup d’articles dans divers journaux ( Le Journal de Paris, La Chronique de Paris, Le Patriote Français, Le Républicain …). Il a beaucoup écrit aussi, comme cela se faisait à l’époque, de façon anonyme ou en utilisant un pseudonyme.
3
. CONDORCET UN PRECURSEUR :
Définition du Grand Larousse Encyclopédique :
Précurseur : « celui qui prépare la voie ».
Dans sa vie d’homme
politique, d’homme de sciences, de journaliste, il fut donc bien un précurseur
au sens de celui qui prépare la voie
Issu du
siècle des lumières, disciple de Voltaire, dernier encyclopédiste vivant,
Condorcet «prépara la voie » à un certain nombre d’idées qui mirent
fort longtemps à être appliquées dans son propre pays, La France. Il fallut
attendre :
-
Une année pour son choix
d’être républicain : Condorcet défend, contre ses propres amis,
l’idée de République dès juillet 1791, celle ci étant proclamée le
21 septembre 1992.
-
Quelques dizaines d’années pour l ‘abolition de l’esclavage
(1848).
-
Près d’un siècle pour l’école publique, laïque et obligatoire
(lois Jules Ferry de 1881 et 1882).
-
Un siècle et demi pour le vote des femmes (1945) et pour la mise en
place d’un système de sécurité sociale applicable à tous les travailleurs.
-
Deux siècles pour l’abolition de la peine de mort (1981).
Combien d’années ou de siècles faudra t il encore
pour que ces idées soient appliquées sur toute la planète, et que les idées
généreuses de Condorcet sur le devenir de l’espèce humaine se concrétisent :
« Nos espérances
sur l’état à venir de l’espèce humaine sont au nombre de trois :
-
La
destruction de l’inégalité entre les nations ;
-
Les
progrès de l’égalité dans un même peuple ;
-
Enfin
le perfectionnement réel de l’homme. »
Extrait de «esquisses d’un tableau historique des
progrès de l’esprit humain ».
.
5.
QUELQUES
REFLEXIONS PERSONNELLES :
1. Valeur
universelle des idéaux issus du siècle des lumières :
Abolition de l’esclavage, tolérance religieuse, égalité des sexes, égalité devant la loi, laïcité de l’état, abolition de la peine de mort, autant d’idées qui ont fini par être acceptées par la majorité de nos concitoyens en France. Peu de responsables politiques, à l’exception des extrêmes oseraient contester ces valeurs, qui sont donc bien des valeurs communes à la majorité des Français, même si des résistances existent et si le «combat militant » doit continuer pour leur application.
Mais ces mêmes idées, qu’on souhaiterait devenir universelles, ne sont pas encore appliquées dans toutes nos démocraties occidentales (peine de mort aux Etats Unis par exemple), et que dire de leur application pour la majorité des autres pays du monde.
2. Quels
autres grands idéaux avons-nous en perspective et pour quelles autres
grandes valeurs universelles devons nous militer ?
Les valeurs dont je viens de parler ci dessus, ne sont devenues les valeurs de la majorité des français et de la plupart des démocraties occidentales que récemment, et à la suite de combats militants livrés par des hommes et des femmes de «bonne volonté » parmi lesquels les francs-maçons ont eu leur part.
Mais aujourd’hui, en France, maintenant que ces valeurs fondamentales sont majoritairement acceptées, ne sommes nous pas en panne de grandes idées à faire reconnaître ?
Le rééquilibrage de la richesse entre pays du Nord et pays du Sud, la lutte pour le respect de l’environnement (dont les trois principales à ce jour à ce jour (classement effectué par le WWF) sont l’effet de serre, le pillage des ressources des océans et la destruction des forêts tropicales ), la lutte anti-mondialisation sont-elles les nouvelles valeurs non encore reconnues et pour la reconnaissance desquelles les «hommes de bonne volonté », doivent mener le combat ?
3.Quels
philosophes aujourd’hui «éclairent notre société » ?
Y a t il des Condorcet actuellement, dont les idées,
les réflexions, les écrits serviraient de base à des valeurs qui auraient
vocation à devenir universelles ?
Je
n’ai pas de réponse à cette question ?
CONDORCET
aujourd’hui
Je voudrais terminer cette «ébauche » en vos
signalant que, aujourd’hui, plus de cent écoles collèges ou Lycée portent
le nom de Condorcet,. qu’il
existe une cinquantaine de Cercles Condorcet en France, créés à
l’initiative de la Ligue de l’enseignement, dont un en Haute Loire qui
s’appelle «le Comité d’Initiatives Citoyennes » dont le siège est
23 Bd Carnot et qui est présidé par Hubert Guillon, qui travaillent en réseau
en réfléchissant sur les problèmes de société.
Extrait de la présentation du Cercle Condorcet d’Aix en Provence sur son site Internet :
«
Rejoindre le Cercle Condorcet, c’est apprendre ou réapprendre à militer,
avec le souci constant d’expliquer, de convaincre et de faire comprendre que
les idées forces des lumières ne prospèreront que si chacun participe en
donnant par l’exemple de sa vie de tous les jours et de ses engagements
collectifs, tout leur sens aux vertus des solidarités agissantes. Adhérer à
Condorcet cela veut donc dire concrètement réfléchir collectivement en
respectant le pluralisme le plus fécond en laissant tout le monde aller au bout
de son argumentation, cela veut dire aussi s'engager à participer à une
commission de travail avec méthode, constance et humilité ; »
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